Page 4 sur 6

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:07 am
par Walt
Confiance et sécurité psychologique :

La confiance est le socle. Les autorités ou initiateurs du projet doivent réellement croire en la capacité des citoyens à contribuer utilement, et le montrer en leur déléguant un véritable pouvoir de décision (pas une consultation factice).

Réciproquement, les participants doivent avoir confiance que le cadre est honnête, qu’on ne les manipulera pas et que leur travail servira concrètement. Sans cette confiance mutuelle, l’initiative risque de tourner court – soit que l’autorité reprenne le contrôle à la première divergence (micromanagement contre-productif), soit que les citoyens se démobilisent en suspectant que « de toute façon, leur contribution ne sera pas prise en compte ».

Dans l’expérience de la Convention Climat, par exemple, le fait que le Président s’engage publiquement à soumettre les propositions “sans filtre” a été déterminant pour instaurer la confiance initiale. De même, Extinction Rebellion souligne que l’autonomie implique la responsabilité : sans comité directeur pour tout valider, chaque groupe assume les conséquences de ses actes, ce qui crée une responsabilisation qui va de pair avec la confiance donnée.

La sécurité psychologique – c’est-à-dire le droit à l’erreur, à l’expérimentation sans crainte de blâme excessif – est également cruciale : innover ou décider de façon autonome comporte toujours un risque d’échec, qu’il faut dédramatiser et considérer comme une opportunité d’apprentissage plutôt que comme une faute.

Cette tolérance à l’erreur est très présente dans l’entraînement militaire (on y simule l’incertitude pour apprendre aux officiers à “faire avec”) et devrait l’être tout autant dans les démarches participatives citoyennes.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:08 am
par Souad
Clarté du mandat et vision partagée :

Pour que la liberté d’action ne se traduise pas par une dispersion chaotique, il faut un cadre clair, compris de tous.

Cela signifie définir explicitement la mission confiée aux participants : quels sont les objectifs à atteindre, les valeurs à respecter, éventuellement les contraintes de temps, de ressources ou de champ d’action.

Un mandat trop flou (du style « faites ce que vous voulez pour améliorer la ville ») peut désorienter et décourager, tandis qu’un mandat bien défini (« proposez des aménagements pour encourager le vélo en ville d’ici 2025 ») donne une cible motivante tout en laissant de la place à l’imagination.

Il faut également établir les règles du jeu : par exemple, comment seront prises les décisions finales (vote, consensus ?), quel engagement de suivi est pris par les autorités, etc., afin que les citoyens sachent sur quoi ils s’embarquent.

La communication initiale est donc primordiale – tout comme dans l’armée un briefing soigné du commandant s’assure que ses subordonnés ont bien saisi son intention. Par ailleurs, il est important de forger une vision partagée ou un narratif commun autour de la mission, afin de souder le collectif.

Des éléments comme une charte de valeurs (chez XR, les 10 principes servent de boussole commune), un slogan mobilisateur, ou un exposé des défis à relever contribuent à aligner les motivations.

Plus chacun voit en quoi sa contribution individuelle s’inscrit dans « l’intérêt commun » ou la “mission globale”, plus il agira de manière cohérente avec les autres, même sans coordination centralisée.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:09 am
par Walt
Engagement et motivation intrinsèque :

Contrairement aux militaires, les citoyens participants sont bénévoles ou volontaires. Leur assiduité et leur sérieux dépendront donc fortement de leur motivation.

D’où l’importance de sélectionner des sujets qui font sens pour eux (un enjeu réel, concret, ressenti comme légitime) et de valoriser leur contribution.

L’engagement citoyen libre repose souvent sur un sentiment d’accomplissement personnel et collectif : se sentir utile, apprendre des choses, rencontrer d’autres personnes partageant les mêmes idéaux.

Les dispositifs participatifs doivent veiller à entretenir ce ressort, par exemple en célébrant les réussites intermédiaires, en donnant de la visibilité au travail accompli, en remerciant publiquement les contributeurs.

Par ailleurs, laisser de la liberté permet à chacun de choisir le rôle où il sera le plus motivé : dans un mouvement horizontal, certains préfèreront organiser des actions de terrain, d’autres rédiger des contenus, d’autres assurer la logistique… cette auto-affectation en fonction des appétences renforce la motivation de chacun et l’efficacité d’ensemble.

L’analogie militaire est que chaque unité a sa spécialité, mais dans un mode mission on peut redéployer les compétences plus souplement selon les opportunités – de même, en participation citoyenne, il faut savoir laisser les individus apporter ce qu’ils ont de meilleur plutôt que de leur imposer une tâche standard.

Au besoin, on peut stimuler l’engagement via des défis positifs (concours amicaux entre équipes, badges de reconnaissance, etc.), mais toujours en respectant l’esprit coopératif.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:09 am
par Souad
Formation, accompagnement et montée en compétences :


Un point souvent souligné est le besoin d’apprentissage pour que les participants exercent pleinement leur autonomie.


Passer d’un fonctionnement vertical où l’on exécute des consignes à un fonctionnement horizontal où l’on co-décide « implique de fonctionner à contre-courant de toute une série de réflexes appris ».

Il faut donc du temps et parfois un accompagnement méthodologique pour que les citoyens (ou les managers, les enseignants, etc., selon le contexte) adoptent de nouvelles postures.

Des organisations spécialisées offrent aujourd’hui des formations à l’intelligence collective et à la facilitation, précisément pour aider des groupes à aller vers plus d’horizontalité.

Par exemple, Extinction Rebellion a mis en place un Système d’Auto-Organisation (SOS) et propose à chaque nouveau membre de suivre des présentations de ce système pour comprendre comment prendre part aux processus décisionnels en autonomie.

De même, les citoyens de la Convention Climat ont bénéficié de l’appui de facilitateurs professionnels lors des ateliers, pour apprendre à délibérer de manière constructive et égalitaire. Ce soutien peut prendre la forme de guides, de kits en ligne, d’ateliers pratiques.

L’idée n’est pas de diriger le contenu (ce serait contraire à l’esprit recherché) mais de donner les outils pour que le groupe s’auto-organise efficacement : techniques de débat, méthodes créatives (par exemple forum ouvert, six chapeaux de Bono, etc. évoquées dans la littérature participative), gestion des conflits, prise de décision collective, etc.

En un sens, cela équivaut à l’entraînement militaire intensif qui prépare les officiers à agir de façon autonome sur le terrain. Ici, on entraîne les citoyens à penser par eux-mêmes en collectif.

Les recherches et retours d’expérience indiquent que cet investissement en formation porte ses fruits : « évoluer dans des espaces plus égalitaires où chacun peut pleinement participer... sont des actes émancipateurs », mais qui demandent effectivement « un énorme effort d’apprentissage » au départ.

Si on n’y prend garde, on risque d’exposer des citoyens à un exercice difficile sans les y avoir préparés, ce qui peut conduire à de la frustration ou à la reproduction des biais (par exemple, sans méthodes, les plus extravertis monopolisent la parole).

En somme, former et accompagner est indispensable pour libérer l’initiative de tous de manière inclusive et efficace.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:10 am
par Walt
Outils numériques et logistique adaptée :

À l’ère digitale, les outils technologiques sont de précieux alliés pour coordonner une participation éclatée sans recentraliser.

Des plateformes de participation en ligne (type civic tech) permettent de recueillir des idées, de délibérer à grande échelle, de voter de façon transparente, tout en laissant chacun contribuer à son rythme et selon ses idées.

Par exemple, la plateforme open source Decidim est utilisée dans de nombreuses villes pour organiser des consultations et budgets participatifs : elle offre un cadre (sujets, échéances) mais les citoyens y proposent et argumentent leurs projets librement, et peuvent interagir entre eux sans intervention d’une autorité modératrice forte.

Dans le cas de la Convention Climat française, un forum numérique dédié (“Jenparle”) a permis aux 150 citoyens de continuer leurs échanges entre les sessions physiques, de manière autonome, afin de garder le momentum et approfondir certaines pistes en intersession.

De même, dans les mouvements comme XR ou les communautés en réseau, on s’appuie sur des outils de communication distribuée (groupes Telegram, Discord, listes de diffusion) pour que les informations circulent latéralement entre les participants plutôt que de remonter et redescendre verticalement.

Un bon usage des technologies peut ainsi suppléer à une structure hiérarchique : le réseau connecte tout le monde, donc chacun peut ajuster son action en fonction de ce que font les autres, sans passer par un centre de commandement.

Toutefois, ces outils requièrent une accessibilité et une formation minimale pour ne laisser personne de côté (il faut veiller à inclure les moins à l’aise avec le numérique, via des solutions mixtes ou un appui humain). Sur le plan logistique plus général, il convient d’adapter l’environnement aux objectifs : par exemple, pour favoriser la participation libre, on choisira des horaires et lieux de réunion adaptés, on prévoira de la garde d’enfants ou des compensations de frais si nécessaire, etc.

Enlever les obstacles pratiques est crucial pour que l’auto-organisation ne reste pas théorique.

Dans l’armée, la logistique assure que les unités aient le ravitaillement et les moyens de communication pour opérer de manière indépendante ; de même, dans la participation citoyenne, il faut fournir aux groupes les ressources matérielles (espaces, budgets de fonctionnement, documentation) qui leur permettent de travailler correctement sur la mission confiée.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:11 am
par Souad
Culture et leadership adaptés :

Enfin, il faut souligner l’importance de la culture dans laquelle s’inscrit l’initiative.

L’Auftragstaktik militaire ne fonctionne que parce qu’elle est soutenue par une culture de corps particulière : valorisation de l’initiative et du courage, droit à l’erreur à l’entraînement, esprit de mission partagé, etc.. De même, une culture démocratique horizontale doit être cultivée pour que la participation libre donne son plein potentiel.

Cela implique, par exemple, de promouvoir l’écoute active, la compréhension mutuelle plutôt que la confrontation – ce qu’on appelle parfois la “posture coopérative”. Les principes de bienveillance, de respect et de responsabilité individuelle sont à encourager constamment.

Souvent, un leadership facilitateur joue un rôle dans cette culture : des personnes, sans imposer leurs vues, peuvent impulser une dynamique positive, rappeler les valeurs communes, désamorcer les tensions. Ce leadership n’est pas vertical mais latéral, on parle parfois de leader serviteur ou de gardien du processus.

Par exemple, au sein d’un groupe citoyen, quelqu’un peut être attentif à ce que chacun s’exprime à égalité, ou qu’on respecte le cadre convenu – un rôle proche d’un “chef” missionné pour veiller à la bonne exécution de l’intention commune”.

Trouver ce subtil équilibre entre absence de domination et maintien d’une cohérence de groupe est un art plus qu’une science. Chaque organisation ou collectif doit élaborer son propre fonctionnement en fonction de sa raison d’être spécifique et de ce que ses membres sont prêts à accepter de changer.

Il n’y a pas de recette universelle, mais des principes directeurs : transparence, inclusion, adaptation continue.

Lorsque cette culture est en place, on constate que l’auto-organisation peut mener à des résultats remarquables, et même « rebattre les cartes et faire jouer le débat démocratique différemment », en libérant des énergies neuves.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:12 am
par Le Guide
Conclusion


Transposer l’Auftragstaktik du champ militaire à la participation citoyenne libre et consciente offre une perspective stimulante sur la manière de revitaliser nos pratiques démocratiques et managériales. Il s’agit en définitive de faire confiance aux personnes sur le terrain, qu’il s’agisse de soldats ou de citoyens, et de leur donner les moyens d’agir de leur propre initiative pour atteindre un objectif collectif. Ce paradigme, fondé sur l’intention partagée, l’autonomie et la responsabilité, trouve aujourd’hui des échos dans la gouvernance des organisations, l’éducation, l’innovation et les mouvements citoyens.


Les exemples analysés – des entreprises adoptant un leadership par mission jusqu’aux conventions citoyennes ou mouvements comme Extinction Rebellion – montrent que lorsqu’un cadre approprié est posé, des acteurs dispersés peuvent converger vers des solutions efficaces et créatives, souvent plus rapidement et avec plus d’appropriation qu’une démarche centralisée classique. Bien sûr, la transposition n’est pas littérale : un citoyen n’est pas un soldat, l’autorité politique n’est pas un commandant militaire, et la motivation volontaire diffère de la discipline. Mais les principes sous-jacents (vision claire, subsidiarité, initiative locale, feedback mutuel, confiance) forment un socle commun adaptable.


En Belgique et en Europe, où l’on cherche de nouvelles formes de démocratie plus directes et d’intelligence collective (budgets participatifs, jurys citoyens, assemblées délibératives permanentes…), intégrer l’esprit de l’Auftragstaktik pourrait signifier : définir de grands objectifs sociétaux ambitieux (par exemple la transition écologique, la cohésion sociale locale), et co-construire avec les citoyens les chemins pour y parvenir, en acceptant de leur déléguer une part du pouvoir de conception et de décision. Les conditions de réussite – que nous avons détaillées – sont exigeantes : il faut du temps, de la pédagogie, et un vrai changement de culture aussi bien chez les décideurs que chez les citoyens (passer du rôle d’exécutant-consommateur de politique à celui de co-décideur actif). Mais les bénéfices potentiels sont à la hauteur : décisions mieux adaptées et plus légitimes, créativité démultipliée, engagement civique renforcé.


Finalement, l’idéal d’une participation citoyenne libre et consciente rejoint la belle promesse de l’Auftragstaktik : « libérer les énergies de chacun au service du but commun ». Dans un monde incertain qui requiert agilité et intelligence distribuée, ce mariage des deux concepts – militaire et civil – nous invite à repenser tant notre gouvernance publique que nos modes d’organisation collective, pour les rendre à la fois plus humains, réactifs et efficaces. Les expériences pionnières en cours en sont le laboratoire vivant, et chaque succès dans ce domaine est un pas de plus vers une société où l’autonomie coopérative n’est plus une utopie, mais une pratique quotidienne de la démocratie.

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:15 am
par adonf
Tout ça c'est chouette mais si vous pouviez soigner la mise en forme ça serait plus sympa…
 ! Message de : adonf
Avec des icônes ou quoi

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:16 am
par adonf
C'est pas dur

Re: Cauchemar de Prussien

Publié : jeu. juin 12, 2025 9:16 am
par adonf
Hors-sujet
voyez ?